Par Natalie Kwadrans
En février 2019, cinq jours après mon anniversaire, j’ai trouvé une grosseur de la taille d’un petit pois dans mon sein droit. Je suis immédiatement allée voir mon médecin, qui m’a envoyé faire une mammographie et une échographie. Le premier rendez-vous disponible était la semaine d’après. Après m’avoir « compressé » les seins à la mammographie, on m’a expédiée à l’échographie. Après ça, le technicien m’a dit qu’il devait examiner les images avec le radiologue afin de s’assurer que tout avait été bien capturé. Je n’ai pas réagi plus que ça puisque c’est ce qui s’était passé quand j’avais fait les échographies lors de mes grossesses. Puis, le radiologue est venu me voir pour me dire qu’il était extrêmement préoccupé par deux choses qui apparaissaient sur les images et qu’il souhaitait :
- me référer immédiatement au programme de santé du sein des Services de santé de l’Alberta;
- prendre rendez-vous pour faire une biopsie, ce que je pouvais faire à leur centre de radiologie.
Il m’a dit qu’il enverrait le tout à mon médecin, mais que ces deux mesures me permettraient d’accélérer le processus et que je n’aurais pas besoin de parler à mon médecin une fois qu’il aurait les résultats. J’ai pu prendre rendez-vous dans leur centre pour une biopsie la semaine d’après. J’étais censée voyager pour le travail, mais j’étais inquiète. Alors, j’ai accepté le rendez-vous et j’ai annulé mon voyage. Je suis contente d’avoir suivi mon instinct, car il s’est avéré que j’étais atteinte d’un cancer du sein métastatique de novo, c’est-à-dire d’un cancer du sein métastatique en premier diagnostic. Comment était-ce possible? J’étais « trop jeune » pour avoir un cancer du sein et je n’étais même pas admissible aux mammographies de dépistage sauf en cas de découverte d’une grosseur — ce qu’il s’était passé. Or, au moment de la découverte, il s’agissait déjà d’un cancer en phase terminale. On m’a dit que j’avais deux ou trois ans à vivre. Je n’en revenais pas.
Je suis rentrée chez moi et j’ai appris la nouvelle à celui qui était mon mari à l’époque. Nous ne savions pas comment l’apprendre à notre fils de deux ans et demi et à notre fille de cinq ans. Nous avons décidé d’attendre que je puisse parler à quelqu’un du service d’oncologie psycho-sociale et que je contacte Wellspring Cancer Support Alberta. Wellspring disposait de livres que nous pouvions lire aux enfants et qui expliquaient que maman était atteinte d’une maladie appelée cancer, qu’est-ce qu’était le cancer et quel impact les traitements auraient sur moi. Mon fils était trop petit pour comprendre réellement ce qui se passait, mais ma fille était terrifiée et posait beaucoup de questions.
Depuis mon diagnostic, j’ai de la difficulté à trouver des ressources pour me préparer ainsi que ma famille à ce qui nous attend. Je ne parle pas ici des traitements et de leurs effets secondaires, car ceux-ci sont on ne peut plus clairs! Mais, je parle des répercussions d’un tel diagnostic sur ma famille, comme la façon dont les enfants gèrent la nouvelle, l’impact sur la vie de famille lorsque l’on passe par des hauts et des bas à cause des traitements, l’impact sur les relations amicales, pour les enfants et pour moi-même, la peur de l’inconnu et de ce qui va se passer, etc.
L’année dernière, j’ai suivi un atelier sur la narration numérique à Wellspring et j’ai décidé de raconter un incident qui était arrivé à ma fille à cause de mon cancer. Puisqu’il s’agissait de ma fille, je voulais raconter cet incident de façon à ce qu’il soit accessible aux enfants et c’est comme ça que l’idée d’une bande dessinée animée m’est venue. Alors que je travaillais sur mon projet, j’ai été encouragée par la rétroaction que je recevais de la part du personnel de Wellspring, des autres patientes qui avaient de jeunes enfants et des professionnels travaillant en oncologie. Ainsi, ce qui devait, au départ, être une simple vidéo s’est transformé en un projet bien plus important.
Malgré les nombreuses ressources qui expliquent le cancer et ses traitements aux enfants, je n’ai pas pu en trouver une seule qui leur parle des répercussions de la maladie sur eux-mêmes. J’ai donc décidé que mon projet serait la première histoire d’une série que j’ai appelée Mommy Has Cancer (Maman a un cancer). Cette série suivra des personnages fictifs — Val, la maman, Isabelle, la fille, et Simon, le fils — aux prises avec les changements et la réalité de leur vie au sein d’une famille dont la mère est atteinte d’un cancer. Je voulais que cette ressource soit disponible à tous les enfants dont les mères ont un cancer du sein, mais je voulais également la laisser en souvenir à mes propres enfants afin qu’ils puissent s’y référer une fois que je ne serais plus là. Ces histoires ont pour but d’aider les parents à avoir ces conversations difficiles que l’on doit avoir avec ses enfants afin de leur parler des défis potentiels qui se présenteront à eux, des émotions qu’ils ressentiront ou des changements qui surviendront dans leur vie. J’aurais tant aimé avoir accès à quelque chose comme ça lorsque j’ai reçu mon diagnostic. C’est dur d’avoir un cancer, mais c’est encore plus dur d’élever des enfants — et dans mon cas maintenant, d’élever seule des enfants — pendant les traitements. Si cette série parvenait à faciliter la vie d’au moins une famille grâce à ce que j’ai vécu, alors elle aura atteint son but.
L’accès à la série « Mommy Has Cancer » est libre. Les liens vers la bande dessinée et les vidéos YouTube, ainsi que vers le blogue de Natalie, se trouvent à MommyHasCancer.ca.