Par Tirzah Cooper
Je m’appelle Tirzah Cooper, j’ai 36 ans et j’ai deux enfants, Vayda (17 ans) et Mason (12 ans). J’habite à Saskatoon avec mon fiancé, l’amour de ma vie. Jusqu’à récemment — jusqu’à mon diagnostic, je travaillais à plein temps pour un chirurgien plasticien depuis cinq ans et j’étais également photographe professionnelle dans mon temps libre.
J’ai d’abord eu des tumeurs bénignes — des fibroadénomes — qui nécessitaient une échographie tous les six mois et puis j’ai eu une plus grosse tumeur, qui a elle aussi été considérée comme bénigne et pour laquelle on m’a dit de ne pas m’inquiéter. Trois mois après ma dernière échographie, cette tumeur s’est rapidement développée au point de devenir douloureuse. Je suis donc allée faire une autre échographie, trois mois plus tôt que prévu, qui a montré que la tumeur évoluait et grossissait extrêmement rapidement. J’ai fait une biopsie le 8 juin 2022.
J’ai eu un mauvais pressentiment à la minute où j’ai vu la tumeur à l’écran lors de l’échographie; je savais que cela ne présageait rien de bon. J’ai pensé à tout ce que cela impliquerait s’il s’avérait que c’était une tumeur maligne. J’étais donc déjà terrifiée avant même de savoir. J’étais vraiment inquiète de ce que l’avenir me réservait. Quand j’ai eu la confirmation qu’il s’agissait bien d’un cancer du sein, j’ai ressenti de la tristesse et de la peur et j’étais sous le choc. Je n’aurais jamais pensé que ça m’arriverait à moi, à 36 ans. J’étais en bonne santé, j’étais active et je n’avais aucun antécédent familial de cancer du sein.
Comme les cellules cancéreuses s’étendaient dans le tissu mammaire au-delà de la tumeur, qui fait deux centimètres, je dois faire cinq mois de chimiothérapie avant de me faire opérer. Je dois d’abord faire quatre cycles du cocktail médicamenteux le plus agressif que l’appelle le « diable rouge », soit une combinaison de doxorubicine, d’adriamycine et de cyclophosphamide, et ensuite, douze cycles de paclitaxel, un autre médicament. Dans les six semaines suivant la fin de la chimiothérapie, je devrai subir une double mastectomie au cours de laquelle on me posera des expanseurs tissulaires. Puis, si le rapport pathologique final montre qu’il reste des cellules cancéreuses, je devrai faire de la radiothérapie. J’espère que la chimiothérapie tuera toutes les cellules cancéreuses et que je n’aurai pas besoin de faire de radiothérapie. Après l’opération, je devrai me rendre à des rendez-vous chaque semaine pour faire remplir les expanseurs tissulaires de solution saline dans le but d’étendre ma peau. Trois mois plus tard, si je n’ai pas besoin de faire de radiothérapie, je subirai la deuxième partie de la reconstruction mammaire qui consistera à remplacer les expanseurs tissulaires par des implants.
Le traitement n’est pas facile, que ce soit sur le plan physique ou psychologique. Le cancer nous touche nous, mais aussi nos proches et notre cercle social. C’est un processus qui nous isole, et ce, même si on est bien entourées, car nous sommes seules à le subir et personne ne peut vraiment savoir ce que l’on ressent au jour le jour. Le plus dur à supporter, ce sont les effets sur le physique. Je me sens tellement faible et exténuée. Je ne peux même pas monter les escaliers sans me sentir essoufflée. J’ai l’impression que, du jour au lendemain, on a échangé mon corps pour celui d’une personne de 90 ans. Sur le plan psychologique, le plus dur c’est la perte de cheveux et le fait de ne plus se reconnaître dans le miroir la plupart du temps.
Je fais de mon mieux pour rester positive et me dire que tout n’est pas fini et que c’est juste un moment à passer. Mais c’est dur de rester positif quand on ne sent pas bien la plupart du temps. J’ai l’impression de devoir composer avec une émotion différente chaque jour. C’est exténuant physiquement et mentalement. Je suis tout le temps en mode survie, essayant de finir chaque journée plutôt que de les vivre. Bien que cela soit un processus long, douloureux et éprouvant, cela m’a permis de remettre plusieurs choses en perspective. Je ne m’inquiète plus autant pour les petites choses et j’apprécie davantage les bons jours et les moments spéciaux, que la plupart des gens tiennent pour acquis.
Ma famille me soutient depuis le début. Je leur ai dit que je voulais être ouverte et partager mon expérience afin de sensibiliser les autres au cancer du sein. Et je me sens vraiment soutenue par eux ainsi que par ma communauté, mais je me rends compte également que c’est très difficile pour eux. J’ai l’impression que je ne fais que penser et parler du cancer. Il ne se passe pas un seul jour sans que le mot cancer ne soit mentionné. Cette maladie a affecté tout mon entourage et je ne pense pas que notre vie redeviendra pareille qu’avant.
Si j’ai un conseil à donner, ce serait de vivre un jour à la fois, d’accepter le sentiment de tristesse, de s’autoriser à pleurer et de ne pas refouler ses émotions. N’hésitez pas à demander de l’aide à vos amis et à votre famille. C’est une expérience terrifiante et vous n’avez pas à la vivre seule. Beaucoup de femmes ont de la difficulté à gérer tout cela, alors que parler avec quelqu’un qui vit la même chose que soi peut s’avérer tellement bénéfique. J’ai été surprise de constater le nombre de femmes qui ont du mal à parler de la maladie ou qui ressentent même de la honte ou de la gêne à en parler. Beaucoup de femmes m’ont contactée pour me remercier d’être si ouverte sur ce que je vis, car ça leur a donné le courage d’en parler.
J’encourage les femmes de tous les âges à prendre l’habitude de pratiquer l’auto-examen de leurs seins et à faire des examens régulièrement. Soyez forte, vous n’êtes pas toute seule. Dans les jours difficiles, souvenez-vous que nous sommes toutes là derrière vous à vous soutenir. Vous allez y arriver et vous en sortirez tellement plus forte.