Par Adriana Ermter
Dans notre rubrique mensuelle, la rédactrice en chef et auteure Adriana Ermter raconte son expérience du cancer du sein.
Si j’avais été chercheuse et que j’avais découvert un moyen d’empêcher le cancer de récidive, je serais tellement riche aujourd’hui! Mais, ce n’est pas le cas. Je suis simplement une femme normale en proie à des coups de stress épisodiques à l’idée que son cancer revienne un jour. Je ne pense pas à ça constamment, mais ça m’arrive assez régulièrement pour que ça soit devenu une constante dans ma vie, comme une arrière-pensée toujours présente. C’est normal étant donné que j’ai eu un cancer du sein et que ça se peut qu’il revienne. Ces pensées semblent ressurgir et prendre de l’ampleur chaque fois que je dois faire une mammographie ou une échographie de contrôle. Et donc, comme en ce moment je pense au nombre de jours qu’il me reste avant mon prochain examen de contrôle, elles ont refait surface.
L’attente des examens de contrôle
J’ai pris rendez-vous il y a quatre mois, puis je me suis battue pour le faire avancer parce qu’en tant que survivante du cancer du sein, je ne me voyais pas attendre neuf mois pour faire un examen de contrôle. Je comprends bien que les hôpitaux sont toujours en prise avec l’arriéré de patients non traités à cause de la COVID, mais j’ai le droit aussi de me soucier de ma santé et de défendre mes intérêts en tant que survivante. Mon rendez-vous est maintenant dans dix jours et je suis nerveuse. Beaucoup plus que d’habitude. J’ai toujours été un peu anxieuse à l’approche de mes rendez-vous médicaux. Mais, depuis quelque temps, je ressens une douleur dans mes deux seins, et plus particulièrement dans le sein droit. En plus, la douleur s’étend jusqu’à l’aisselle, ce qui m’inquiète au plus haut point. Je me demande si le cancer n’est pas revenu.
La douleur n’est ni handicapante ni lancinante, c’est plus comme une douleur sourde qui vient et qui s’en va, comme une pulsation. C’est assez régulier, alors j’aimerais savoir ce qu’il se passe. Et puis, quand j’y pense, je ne suis pas toujours rationnelle. Je me dis, par exemple, que c’est peut-être dû à une accumulation de tissu cicatriciel — mais je ne sens aucune grosseur. Comme j’ai les seins denses, je n’arrive pas toujours à bien sentir ce qu’il y a sous mes doigts, à part le tissu mammaire, quand je fais de l’autopalpation. C’est peut-être dû à de l’adhérence cicatricielle, phénomène qui se produit quand une bande de tissus cicatriciels fusionne avec une autre surface ou d’autres tissus. Ça peut aussi être dû à la montée des hormones prémenstruelles. Mais, et c’est un « mais » important, ça peut aussi vouloir dire que le cancer est revenu. J’essaie de ne pas y penser jusqu’à ce que j’aie les résultats des examens de contrôle et que j’aie toutes les données en main.
Statistiques sur la récidive du cancer du sein
J’ai aussi lu énormément sur la récidive du cancer du sein. Pratiquement toutes les organisations connues, comme la Société canadienne du cancer, Rethink Breast Cancer et le Réseau canadien du cancer du sein, s’accordent à dire qu’une femme canadienne sur huit sera un jour atteinte d’un cancer du sein et qu’une femme sur 34 en mourra. Ce que l’on connaît moins ou, peut-être, qu’on n’en parle pas moins, ce sont les statistiques sur la récidive du cancer du sein.
Selon BreastCancer.Org, 40 % des personnes atteintes d’un cancer du sein triple négatif de stade précoce et jusqu’à 50 % des personnes atteintes d’un cancer du sein inflammatoire sont plus susceptibles de connaître une récidive. De plus, les cancers à récepteurs d’œstrogènes positifs présentent un plus grand risque de récidive dans les dix ans ou plus suivant le diagnostic initial, et les cancers à récepteurs hormonaux négatifs sont plus susceptibles de revenir dans les cinq ans suivant le diagnostic. En réalité, si vous avez déjà eu un cancer du sein, vous savez que vous êtes prédisposé(e) à une récidive. Ce qui est sûr, c’est que ces statistiques sont choquantes. Selon BreastCancer.Org, le cancer du sein peut aussi revenir dans d’autres parties du corps des mois ou des années après le diagnostic initial et les traitements. On appelle ça une récidive métastatique ou distante. Près de 30 % des femmes atteintes d’un cancer du sein de stade précoce connaissent ce type de récidive.
Je sais, ces chiffres sont impressionnants et épeurants. Ils sont pratiquement hors de contrôle et je hais ça. Toutefois, en tant que survivant(e)s d’un cancer du sein, il y a six choses que nous pouvons faire pour aider à diminuer le risque de récidive. Ce sont ces choses qui me permettent de rester saine d’esprit et de me concentrer sur le positif, car honnêtement, transformer mes peurs en actions proactives me permet de rester motivée et optimiste, et de me sentir bien au lieu de sombrer.
Six façons d’aider à prévenir la récidive d’un cancer du sein
- Faites de bons choix
Comme avoir sept à huit heures de sommeil par nuit, boire beaucoup d’eau, faire de l’exercice régulièrement, avoir une alimentation équilibrée remplie de fruits et de légumes, et maintenir un poids sain. Je fais tout mon possible pour suivre ces recommandations. Je ne mange pas beaucoup de fruits, mais je compense en mangeant plus de légumes. Je mange moins de fromage, alors que j’adore ça, et j’arrive à éviter le rayon de croustilles lorsque je vais faire l’épicerie à No Frills. Par contre, j’ai de la difficulté à maintenir un poids santé, c’est-à-dire à perdre le poids accumulé avec le tamoxifène. Mais, je fais ma part : je fais régulièrement des marches rapides, je me couche tous les soirs à 21 h tapantes et je me réveille à 5 h 30. Je pourrais certainement faire mieux, mais je ne suis pas un robot et tous ces efforts font que je me sens bien et que je me sens en contrôle, et j’aime ça.
- Insistez pour faire vos examens de contrôle
Qu’on se le dise, les examens de contrôle représentent notre filet de sécurité. Il est essentiel de faire des contrôles médicaux, des mammographies et les autres examens recommandés régulièrement. Ces examens sont non seulement faits pour s’assurer de notre santé, mais également pour nous donner l’occasion de parler de nos préoccupations aux professionnels de la santé. Le savoir et la vigilance sont des éléments clés de notre arsenal contre une récidive du cancer. Alors il se peut que vous ayez à lutter pour obtenir ces examens et que cela vous demande du temps et de l’énergie, mais ça en vaut la peine.
- Connaissez le statut de vos récepteurs hormonaux
Les cancers du sein sont classés en fonction du statut des récepteurs hormonaux, qui détermine leur réponse aux traitements hormonaux. Si vous avez eu un cancer à récepteurs hormonaux positifs, les traitements hormonaux, comme le tamoxifène ou les inhibiteurs de l’aromatase, peuvent réduire significativement vos risques de récidive. En toute honnêteté, ce n’était pas mon point fort. J’ai arrêté de prendre du tamoxifène au bout de deux ans, soit trois ans avant la fin du traitement, parce que cela avait des répercussions sur ma qualité de vie. Rassurez-vous, je n’ai pas subitement décidé, un jour, de jeter le reste de mes comprimés dans les toilettes, même si j’en avais vraiment envie. Avant d’arrêter, j’ai consulté l’équipe soignante d’oncologie et j’ai évalué le pour et le contre. Je ne regrette pas mon choix. Ce choix était le mien. Ça faisait deux ans que je subissais ce tourbillon médicamenteux et que je me disais, en vain, qu’il fallait que je donne du temps au médicament malgré les horribles effets secondaires. Depuis que je l’ai arrêté, je suis plus heureuse et j’ai plus d’énergie. Je me demande tout de même, parfois, si j’ai fait le bon choix ou si j’encours un plus grand risque de récidive.
- Suivez une thérapie
Je parle parfois de mon choix d’abandonner le tamoxifène avec mon thérapeute, que je vois une fois par semaine. Les personnes qui ont eu un cancer ressentent plus de stress et d’anxiété sur la vie en général, ce qui peut avoir des répercussions sur notre santé. C’est pourquoi je pense, que la thérapie peut être d’une grande aide. C’est également l’avis des National Institutes of Health, selon lesquels 25 % des personnes qui ont eu un cancer sont en proie à de la détresse psychologique, qui peut se manifester par de l’anxiété, des crises de panique, un syndrome de stress post-traumatique, de l’inquiétude liée au cancer et bien plus. La résilience est un puissant atout pour lutter contre la récidive d’un cancer. Tout comme les activités qui procurent de la joie, comme la méditation, la marche avec des amis, la lecture d’un bon livre, le visionnage d’une série qu’on aime sur Netflix, les groupes de soutien ou encore parler de ses sentiments avec sa famille et ses amis.
- Connaissez votre risque génétique
Certains cancers du sein sont associés à des mutations génétiques, comme les mutations des gènes BRCA1 et BRCA2. Si vous avez des antécédents familiaux de cancer du sein ou si vous êtes porteur(se) de ces mutations, discuter des stratégies permettant de réduire les risques de récidive avec un(e) conseiller(ère) génétique peut changer votre vie. Votre équipe soignante d’oncologie peut vous aider à trouver un(e) conseiller(ère), alors n’hésitez pas à lui en parler. Vous pouvez aussi décider de faire une opération prophylactique ou faire des examens de contrôle supplémentaires afin de pouvoir prendre des décisions éclairées pour votre santé.
- Souvenez-vous : le cancer ne vous définit pas
Il n’y a pas de doute, le cancer du sein fait partie de mon histoire. Mais, il ne représente pas l’intégralité de mon histoire et il ne définit pas qui je suis. Il faut parfois que je me rappelle que je suis forte et indépendante, et que je suis une excellente maman pour mes chats. Mais chaque fois que je le fais, ça en vaut vraiment la peine. Me souvenir de qui je suis me donne du réconfort et me permet de me rappeler que je suis plus qu’une femme à qui il manque un bout de chair de la taille d’une boule de glace au niveau de l’aisselle et du sein droits. Je suis résiliente, je suis informée et je suis capable de gérer les incertitudes et les défis qui se présentent à moi. En adoptant un mode de vie sain, en effectuant le suivi médical recommandé, en comprenant mes besoins et en gérant mon stress, et en faisant des activités qui font plaisir, je fais ma part.
Adriana Ermter est une auteure et rédactrice primée. Vous pouvez lire ses écrits dans Living Luxe, Figure Skater Fitness et IN Magazine, ainsi qu’en ligne sur les sites 29Secrets.com, RethinkBreastCancer.ca, Popsugar.com et AmongMen.com. L’ancienne chroniqueuse beauté du magazine FASHION et rédactrice en chef de Salon et Childview habite à Toronto avec ses deux chatons, Murphy et Olive. Vous pouvez la suivre sur Instagram (@AdrianaErmter).