Par Kitt Ritchie
Je suis atteinte d’un cancer du sein métastatique de stade 4. Un cancer du sein devient métastatique lorsqu’il se propage à d’autres parties du corps — en général, les os, le foie, les poumons et le cerveau. Il n’existe aucune cure, mais il existe des traitements qui permettent à certaines femmes de vivre plusieurs années avec ce cancer.
J’ai appris que j’avais un cancer du sein métastatique en décembre 2020. On m’avait tout d’abord diagnostiqué un cancer du sein au stade précoce. Deux semaines après ma double mastectomie, les résultats des analyses pathologiques ont finalement montré qu’il s’agissait d’un cancer de stade 4 et qu’il s’était propagé aux poumons et aux os. Depuis, il semblerait que mes poumons ne soient plus touchés (youpi!) et que le cancer soit uniquement présent dans mes os — colonne vertébrale, côtes et hanches. Je suis un traitement quotidien semblable à de la chimiothérapie (comprimés) qui a d’affreux effets secondaires. J’ai mal la plupart du temps, mais c’est tolérable pour l’instant. Je me sens misérable et exténuée, mais au moins je n’ai pas perdu mes cheveux! Tous les trois mois, je dois aller à l’hôpital pour que l’on m’injecte un produit pour renforcer mes os et lutter contre les tumeurs.
Le cancer du sein métastatique du sein ne se voit pas. Je n’ai pas l’air malade. En fait, à première vue, on ne devinerait jamais que je suis atteinte d’un cancer en phase terminale. On pourrait même croire que je suis en pleine santé : j’ai une chevelure bouclée abondante, je suis potelée (en surpoids) et j’ai les joues roses, voire rouges. Physiquement, je suis restée la même — peut-être avec une légère prise de poids. Certains médicaments, en particulier les inhibiteurs d’œstrogènes et les stéroïdes, me font prendre du poids, me donnent des bouffées de chaleur et font rougir mon visage — ce sont là pourtant les effets secondaires les plus agréables.
Mon état de santé est stable depuis un an et demi. Le traitement que je prends a réussi a stoppé la propagation du cancer. Quand il recommencera à se propager, je devrai changer de traitement. Il existe plusieurs traitements et la plupart d’entre eux permettent de bien ralentir la propagation de la maladie, aussi devrais-je avoir encore plusieurs années à vivre. Combien? Personne ne sait exactement étant donné le caractère imprévisible de la maladie, mais je pense qu’il me reste environ quatre à huit ans, si j’ai de la chance — et si je peux le supporter. J’ai 56 ans et je pense pouvoir me rendre à 60 ans. Pour être honnête, je ne suis même pas sûre d’atteindre 65 ans. C’est comme ça, et je dois l’accepter. Et bizarrement, je l’accepte en général.
J’ai de bons jours et de mauvais jours. J’ai aussi des jours « au lit » lorsque mon corps ne veut ou ne peut pas faire grand-chose. Certains jours, j’ai de l’énergie pendant quelques heures, mais ces jours-là se font de plus en plus rares. Je n’arrive plus à faire ce que je faisais avant. Je me fatigue rapidement. Je ne suis pas autorisée à pratiquer les activités sportives que j’adorais faire avant, comme le ski, le cheval, la nage, la plongée, le golf... Je dois faire attention à cause des risques de fractures et pour ma colonne vertébrale. Je ne peux même pas passer l’aspirateur longtemps. Heureusement que mon conjoint aime faire le ménage et passer l’aspirateur! En revanche, je peux marcher. Ça nous fait du bien et j’adore marcher en pleine nature. J’ai toujours été très active et forte physiquement. Or, je sens que je m’affaiblis, même si j’essaie de rester aussi active que possible. C’est incroyablement frustrant et c’est ce qui me dérange le plus avec cette maladie. Il m’arrive souvent de me pousser à fond, jusqu’à l’épuisement total, au point que je doive rester alitée pendant un jour, voire deux.
Les personnes atteintes d’un cancer du sein métastatique doivent prendre des traitements quotidiens pour le restant de leurs jours. C’est loin d’être agréable. On doit faire des radios à intervalles réguliers, se faire injecter des produits, faire de la chimio et de la radiothérapie, faire des analyses sanguines, se rendre à l’hôpital pour divers rendez-vous, voir des oncologues et d’autres médecins. Ce n’est certainement pas comme cela que je voyais ma retraite. Oh que non!
Plus la douleur empirera, moins la vie sera plaisante. Je n’ai pas l’intention de rester là jusqu’à la fin. Dès que j’aurais perdu la joie de vivre, je m’en irai. Je ne laisserai personne me nourrir ni changer mes couches, ça c’est sûr! C’est très important pour moi de vivre et de mourir avec dignité et en toute indépendance. Au-delà du fait d’être en vie, il y a la qualité de vie. Pour l’instant, ma vie est tolérable. J’arrive, la plupart des jours, à mettre le cancer de côté et apprécier la vie. Le déni est une bonne chose. C’est quelque chose de nouveau pour moi et que j’apprends à mettre en pratique. Le déni est bon pour les personnes en phase terminale, car il permet de sentir normale, de ne pas se sentir malade. La vie est courte et, dans mon cas, la fin est de plus en plus proche. C’est pourquoi j’essaie de vivre du mieux possible et le plus longtemps possible. C’est vraiment la chose que l’on peut faire.