Par Adriana Ermter
Dans notre rubrique mensuelle, la rédactrice en chef et auteure Adriana Ermter raconte son expérience du cancer du sein.
Il y a quelques années, on m’a diagnostiqué un cancer du sein de stade précoce. Paradoxalement, alors qu’on entend, à longueur de journée, parler de marches, de courses, de fondations et de collectes de fonds pour ou contre le cancer et que, normalement, il n’y a que six degrés de séparation entre chacun d’entre nous et une personne touchée par le cancer, je n’avais aucune idée de ce que cela signifiait. Ni au sens littéral ni au niveau personnel s’agissant de ma santé à ce moment-là et à l’avenir, ainsi que de ma vie. L’annonce du diagnostic a été très dure pour moi. Je ne savais pas quoi en penser. Cela a eu plus d’impact sur moi sur le plan émotionnel que quand mon ex-mari m’a annoncé qu’il ne m’aimait plus. À ce moment-là, j’avais réagi immédiatement en pleurant toutes les larmes de mon corps pendant des mois. Mais quand on m’a dit que j’avais un cancer, mon esprit, mon cœur et mes émotions, et en particulier mon espoir, se sont mis en berne et tout ce qui m’entourait n’était plus qu’un brouhaha.
Pendant que j’essayais de digérer la nouvelle et de comprendre ce que cela signifiait pour moi et mes aspirations futures, je me suis plongée dans la recherche d’informations — ma zone de confort. Étant curieuse de nature et de par ma profession — je suis rédactrice, je me sens en contrôle lorsque je suis informée et que je connais tout ce qu’il y a à savoir sur un sujet. Je me suis donc plongée dans une recherche d’informations sans fin. Je ne quittais plus Google et je posais des centaines de questions aux médecins dans le but de me préparer du mieux possible à ce qui m’attendait. Et voici ce que j’ai appris sur le cancer du sein de stade précoce.
Qu’est-ce qu’un cancer du sein de stade précoce?
Les cancers du sein sont classés selon deux caractéristiques importantes : le stade et le grade. Un cancer du sein de stade précoce signifie que la tumeur se trouve dans un seul endroit, la plupart du temps dans un sein — dans mon cas, elle se trouvait sous mon aisselle droite et s’étendait dans mon sein. Cela signifie également que le cancer ne s’est pas propagé en dehors du sein ni dans d’autres parties du corps par la circulation sanguine ou le système lymphatique. En fonction de la taille de la tumeur, un cancer du sein de stade précoce peut être de stade 0, de stade I ou de stade II.
La taille compte
La taille de la tumeur est essentielle dans la détermination du stade d’un cancer. Elle permet également de déterminer le type de traitement à administrer — opération, radiothérapie, chimiothérapie, tamoxifène, etc. En général, les tumeurs de petite taille sont associées à un stade précoce et à un meilleur pronostic de survie. Les tumeurs plus grosses indiquent que le cancer est à un stade avancé et que le risque de récidive et de métastases dans d’autres parties du corps — conséquences de la propagation du cancer par le système lymphatique — est plus élevé.
Lorsque les médecins parlent de la taille de la tumeur, ils font référence à ses dimensions, qui sont généralement mesurées en pouces, en centimètres ou en millimètres. Cela leur permet de connaître l’espace occupé par la tumeur dans le tissu mammaire et d’imaginer à quoi elle ressemble. On peut littéralement prendre une règle ou un ruban de mesure et dessiner la tumeur sur une feuille de papier. Je le sais, car c’est ce que j’ai fait. Ma tumeur ressemblait à un gros petit pois, ce qui bizarrement l’a rendue plus réelle à mes yeux.
En revanche, tout a commencé à s’embrouiller dans ma tête lorsque les médecins ont parlé du diamètre de ma tumeur. Cela devenait trop abstrait pour moi et je n’ai pas réussi à me la représenter et à la dessiner, ce qui a fait que je me souciais moins de cet aspect-là. Or, il semblerait que le diamètre d’une tumeur soit une donnée très importante. Mesuré là où la tumeur est la plus étendue, le diamètre sert à classer la tumeur — petite, moyenne ou large. Elle fournit également d’importantes informations sur l’étendue de la tumeur, et son potentiel de croissance et de propagation.
Le dépistage précoce est une bonne chose, mais…
Même si les médecins ont pu me donner la plupart de ces données théoriques avant mon opération, les mesures exactes de la tumeur n’ont pu être confirmées qu’une fois celle-ci extraite, après mon opération. Cela m’a pris du temps pour assimiler ces informations et je n’en ai parlé qu’à un cercle restreint d’amis et de membres de ma famille en qui j’avais confiance. Lorsque j’ai pu enfin parler ouvertement de mon diagnostic et du stade et du grade de mon cancer, beaucoup de gens, dont quelques membres de ma famille, se sont empressés de discréditer mes propos en disant que « j’avais de la chance », que « c’est à peine si j’avais un cancer » ou encore que « ma guérison serait super facile ». C’est fou comme certaines personnes se sentent à l’aise de dire ce genre de choses. Peut-être qu’ils m’ont dit cela pour que je me sente mieux? Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c’est que je ne me sentais pas chanceuse d’avoir un cancer, et ce, quel que soit son stade. Je ne me suis jamais apitoyée sur mon sort et, pas une fois, je ne me suis demandé pourquoi cela m’arrivait à moi.
Selon la Société canadienne du cancer, une femme sur huit aura un cancer du sein au cours de sa vie. Tout comme moi, 50 % de ces femmes n’auront aucun antécédent familial et il se peut même que leur cancer soit détecté tôt. Pourtant, le gouvernement du Canada estime qu’indépendamment du stade du cancer, une femme sur 34 meurt d’un cancer du sein chaque année. Bien que le dépistage précoce ne garantisse pas qu’on ait un cancer de stade I ou qu’on survive, il en augmente les chances.
C’est pour cela qu’il est important de savoir que même si un cancer du sein est à un stade précoce, il peut y avoir des différences dans le pronostic de survie et dans l’efficacité des traitements en fonction de la biologie de la tumeur, de la présence ou non de récepteurs hormonaux, de la surproduction ou non de la protéine HER2, et des caractéristiques propres à chacune. Bien que de nombreuses femmes atteintes d’un cancer du sein de stade I présentent un excellent taux de survie à long terme, d’autres connaissent des récidives ou une progression de la maladie en dépit d’un dépistage précoce et des traitements. Le fait est que le cancer du sein est une maladie complexe qui a de nombreux sous-types et qui présente différents comportements biologiques. Certaines formes agressives peuvent progresser rapidement, et ce, même si elles ont été détectées tôt. Toutefois, un dépistage précoce permet une prise en charge médicale rapide, à un moment où le cancer est le plus facile à traiter.
Alors, quel est votre rôle dans le dépistage précoce?
Une fois par mois, procédez à l’autopalpation de vos seins. Selon une étude réalisée en 2017 par l’American College of Obstetricians and Gynecologists, environ 50 % des cas de cancer du sein chez les femmes de 50 ans et plus, et 71 % des cas de cancer du sein chez les femmes de moins de 50 ans avaient été détectés par les femmes elles-mêmes. Cela signifie que c’est à la suite de la découverte d’une masse cancéreuse que ces femmes sont allées voir un spécialiste. Cela remet l’importance de l’autopalpation mensuelle de ses seins en perspective, non?
Avant d’avoir un cancer du sein, je n’avais quasiment jamais pratiqué l’autopalpation de mes seins. C’est par hasard, en me savonnant sous la douche, que j’ai découvert ma tumeur. Et heureusement! Aujourd’hui, j’examine religieusement mes seins en les regardant et en les tâtant. Chaque premier du mois, je me mets devant le miroir et j’examine mes seins nus, à la recherche d’éventuelles anomalies. En faisant cela régulièrement, en réalisant une mammographie chaque année et en faisant part à votre médecin de toute préoccupation que vous pourriez voir rapidement, vous maximiserez les avantages d’une détection précoce et optimiserez vos chances de survie si, comme moi, vous veniez à découvrir une tumeur. Même si le cancer du sein touche plus fréquemment les femmes de plus de 50 ans, tout le monde, quel que soit l’âge, la race ou le genre, peut développer un cancer du sein de stade précoce.
Les 5 signes et symptômes d’un cancer du sein de stade précoce
Malgré le fait que chaque cancer soit unique, la présence d’un cancer du sein peut être révélée par cinq signes et symptômes. Pour les repérer, il vous suffit d’examiner vos seins nus devant un miroir et de réaliser une autopalpation mammaire une fois par mois.
- Une grosseur ou une masse dure est présente.
C’est le symptôme le plus commun. La grosseur ou la masse peut se trouver dans un sein ou sous une aisselle. Elles sont généralement indolores, mais peuvent être sensibles au toucher. - Le sein semble différent en apparence et au toucher.
Vérifiez si vos seins n’ont pas changé de taille ou de forme. Un cancer du sein de stade précoce peut entraîner une augmentation de la taille du sein ou l’affaissement du sein par rapport à l’autre. Il peut également changer la forme ou le contour du sein. - La peau du sein est différente.
Le cancer modifie l’apparence et la sensation au toucher du sein. La présence d’une rougeur, de plis, de fronces ou d’un épaississement du tissu mammaire peut être le signe de la présence d’un cancer du sein. - Un mamelon a une apparence différente.
Est-ce que l’apparence de l’un de vos mamelons a changé? Peut-être qu’il s’est inversé, qu’il s’écaille ou que du liquide, qui ne ressemble pas à du lait, en sort? - Les seins sont douloureux.
Bien que ce ne soit pas un symptôme commun du cancer du sein, il peut s’agir d’un indicateur. Si vous ressentez une douleur inhabituelle ou persistante dans l’un de vos seins, ou dans les deux, ou sous une aisselle, allez voir votre médecin pour qu’il vous examine.
Comment être proactive pour la santé de ses seins?
On est toujours le meilleur défenseur de sa santé. Si quelque chose vous semble suspect, parlez-en, faites-vous examiner par un médecin et insistez pour recevoir le soutien et les traitements appropriés. Il s’agit de votre corps et vous seule pouvez en prendre soin.
Demandez à faire une mammographie chaque année, en particulier si vous avez 40 ans ou plus. Ce type d’examen permet souvent de détecter les tumeurs qui sont trop petites pour être détectées à l’autopalpation et donc d’obtenir une prise en charge rapide. Il se peut que, comme moi, vous ayez besoin de faire d’autres examens, comme des échographies ou des IRM. Si quelque chose semble suspect lors de ces examens, il se peut que l’on vous fasse une biopsie, c’est-à-dire qu’on vous prélèvera un échantillon de tissu ou de tumeur afin de l’examiner au microscope. Il est capital de faire des examens de dépistage, car plus le cancer est détecté tôt, plus il est possible de le traiter et d’utiliser des méthodes moins invasives, et plus les chances de survie sont élevées.
Le dépistage précoce d’un cancer du sein vous permet également de faire des économies ainsi qu’à notre système de santé, et même aux futures femmes qui seront touchées par cette maladie. En effet, le traitement d’un cancer du sein de stade précoce coûte, en général, moins cher que celui des cancers à des stades plus avancés, car ceux-ci peuvent nécessiter des traitements plus intensifs, une hospitalisation et d’autres soins. De plus, quand les médecins de famille, les centres d’oncologie et nous-mêmes nous investissons dans le dépistage précoce, le système de santé peut réduire la charge financière liée au traitement des cancers du sein et répartir les ressources de manière plus efficace, ce qui profitera à un plus grand nombre de patients. Enfin, lorsque l’on s’occupe soi-même de sa santé, on a l’impression d’avoir plus de contrôle sur la maladie et dans notre vie.
Adriana Ermter est une auteure et rédactrice primée. Vous pouvez lire ses écrits dans Living Luxe, Figure Skater Fitness et IN Magazine, ainsi qu’en ligne sur les sites 29Secrets.com, RethinkBreastCancer.ca, Popsugar.com et AmongMen.com. L’ancienne chroniqueuse beauté du magazine FASHION et rédactrice en chef de Salon et Childview habite à Toronto avec ses deux chatons, Murphy et Olive. Vous pouvez la suivre sur Instagram (@AdrianaErmter).