Le Réseau canadien du cancer du sein (RCCS) a participé à la Septième conférence internationale de consensus sur les cancers du sein de stades avancés (Seventh International Consensus Conference on Advanced Breast Cancer) ou « conférence ABC7 », qui a eu lieu du 9 au 11 novembre 2023, à Lisbonne, au Portugal. Nous vous en présentons ci-dessous quelques points saillants :
Thèmes cliniques
Les derniers résultats de la 3e phase de l’essai PHOEBE montrent que l’association du pyrotinib et de la capécitabine peut améliorer de manière significative le taux de survie global des personnes atteintes d’un cancer du sein HER2+ métastatique.
Les participants ont reçu soit une combinaison de pyrotinib et de capécitabine, soit une combinaison de lapatinib et de capécitabine. Le taux de survie moyen des patients ayant reçu du pyrotinib était de 39,4 mois, comparé à 28,6 mois pour ceux ayant reçu du lapatinib. Cette étude a permis de démontrer une constance dans les avantages liés à l’administration de pyrotinib, et ce, quels qu’aient été les traitements antérieurs.
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Exploration de la définition et de lignes directrices pour la résistance endocrinienne chez les personnes atteintes d’un cancer du sein avancé HR+.
Définir la résistance endocrinienne peut permettre de déterminer si les traitements non hormonaux, comme la chimiothérapie, devraient constituer les principaux traitements à utiliser pour les personnes atteintes d’un cancer du sein HR+. Selon les directives actuelles, la « résistance endocrinienne primaire » se caractérise par une rechute pendant les deux premières années d’un traitement adjuvant par hormonothérapie ou la progression de la maladie dans les six premiers mois d’un traitement contre le cancer du sein métastatique, tandis qu’on parle de « résistance endocrinienne acquise » lorsque la rechute ou la progression de la maladie se font après ces laps de temps. Toutefois, compte tenu des nouveaux traitements, plus efficaces, et des nouvelles options de chimiothérapie, moins nocives, qui existent actuellement, l’intervenant pense que cette définition traditionnelle de la résistance endocrinienne devrait être mise à jour étant donné que beaucoup de patients qui ne répondent pas aux traitements initiaux répondent à des traitements plus récents, à des stades plus avancés de la maladie. Il suggère de focaliser la nouvelle définition davantage sur les caractéristiques des cancers et non sur des périodes définies.
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Traitements anti-HER2 après l’apparition de métastases cérébrales
Cette étude porte sur les effets des traitements anti-HER2 chez les personnes atteintes d’un cancer du sein métastatique ayant développé des métastases au cerveau. Les participantes ont reçu un traitement anti-HER2 et de la radiothérapie, seuls ou en association avec une opération chirurgicale. Les résultats montrent une amélioration significative du pronostic des personnes ayant reçu un traitement anti-HER2 après avoir développé des métastases au cerveau. L’étude a également montré que certains facteurs, comme le type de traitements localisés, le nombre de traitements, le nombre de métastases, l’âge et l’administration d’un traitement systémique, étaient associés à un meilleur taux de survie.
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Utilisation de l’intelligence artificielle pour la détermination des résultats des traitements chez les personnes recevant des inhibiteurs des CDK 4/6
Dans cette étude, des chercheurs canadiens de Sinai Health (Toronto) ont utilisé l’intelligence artificielle pour analyser les données provenant de personnes atteintes de cancers du sein métastatiques traités à l’aide d’inhibiteurs des CDK 4/6 – un type de médicaments utilisés dans le traitement des cancers du sein HR+ et HER2-. L’intelligence artificielle a permis aux chercheurs d’analyser les schémas thérapeutiques et les résultats de ces traitements chez des patients à qui on avait administré des inhibiteurs des CDK 4/6 et des traitements hormonaux entre 2016 et 2021. Les chercheurs ont pu identifier les patients et avoir accès à des données réelles qui auraient probablement été inaccessibles avec les méthodes traditionnelles de collecte de données. Ils ont pu ainsi confirmer l’efficacité des inhibiteurs des CDK 4/6 comme traitements de première intention contre les cancers du sein métastatique HR+ et HER2- en contexte réel.
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Traitements
Les « répondants à long terme » pourraient-ils tirer parti de pauses dans leurs traitements?
Cette présentation portait sur les possibilités d’amélioration des soins apportés aux personnes atteintes d’un cancer du sein métastatique qui répondent bien à un traitement – appelées « répondants à long terme ». Est-ce dans l’intérêt des répondants à long terme de faire des pauses dans leurs traitements au lieu de les prendre en continu de façon indéfinie? Pour répondre à cette question, l’intervenant a tout d’abord proposé de déterminer ce qui définit un répondant à long terme (ce qui doit certainement différer en fonction du sous-type), ainsi que la réponse du patient au traitement. À noter qu’il se peut que les personnes prenant des traitements plus avancés ou atteintes d’un cancer du sein triple négatif ne puissent pas arrêter leurs traitements. En conclusion, il apparaît que la mise en pause d’un traitement nécessiterait une approche holistique, à savoir la prise en considération du pronostic, de l’efficacité du traitement, de la tolérance au traitement et des préférences du patient.
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Optimiser la prise partagée de décisions
On observe dans les systèmes de soins de santé un tournant positif centré sur les soins aux patients. La prise partagée de décisions présente de nombreux avantages, dont l’atténuation de la peur, une meilleure observance des traitements et l’amélioration de la qualité de vie. Toutefois, la collaboration plus active entre un patient et son médecin présente un certain nombre de difficultés. Lors de cette présentation, Lesley Fallowfield (Royaume-Uni) a expliqué les répercussions que cela avait eu sur les patients et la façon dont une meilleure communication pouvait mener à un meilleur dénouement.
Le cancer du sein est une maladie complexe et les traitements le sont tout autant. Devant cette complexité, il peut être difficile pour les patients, dont l’état émotionnel peut être précaire, de comprendre les différentes options qui s’offrent à eux. De plus, les patients ont des besoins et une capacité de compréhension différents, et leurs préférences en matière de prise de décisions peuvent également différer : certains sont passifs, alors que d’autres collaborent ou sont actifs dans le choix de leurs traitements. Enfin, les objectifs des patients peuvent différer de ceux de leur médecin en termes de traitements, mais également en termes de direction à suivre et de nombre de rendez-vous. Des défis peuvent survenir lorsqu’un patient, anxieux ou qui ne se sent pas bien, a des difficultés à expliquer ses préférences dans le temps imparti avec son médecin.
Comme le dit l’intervenante, « la prise de décisions est rarement rationnelle ». Les émotions, le degré d’optimisme et l’incertitude y jouent un rôle crucial, car ils influent sur le degré de compréhension du patient concernant les options qui lui sont proposées. Il est donc essentiel d’établir une communication efficace entre un patient et son médecin. D’autant plus que la désinformation accessible via les réseaux sociaux et Google peut augmenter l’anxiété des patients. Les patients ont besoin qu’on leur présente des informations basées sur des données factuelles, et ce, dans un format qui leur soit bénéfique et de façon à ne pas rabaisser leurs valeurs ou leur niveau de connaissance. Pour que la prise partagée de décisions soit efficace, les conseils médicaux donnés aux patients doivent être en adéquation avec leurs modes de vie et leurs préférences.
Favoriser les discussions sur le pronostic vital et la fin de vie
Cette présentation portait sur les aspects critiques du pronostic et de la fin de vie pour les personnes atteintes d’un cancer du sein métastatique. Discuter du pronostic de leur maladie avec les patients est essentiel, car cela leur permet de préparer leur avenir. Un patient qui connaît son espérance de vie est plus susceptible d’opter pour des soins palliatifs tôt et améliorer ainsi sa qualité de vie. Toutefois, le sujet du pronostic peut être une tâche délicate pour les médecins et un sujet difficile pour les patients.
Les médecins peuvent utiliser plusieurs stratégies pour lancer la conversation. Ils peuvent, par exemple, en parler avec leurs patients le plus tôt possible et souvent, et s’aider d’une liste de questions à poser pour guider la discussion. (L’outil PatientPath du RCCS propose des listes de questions à poser à son équipe médicale. En anglais seulment). Il est également important de continuer ses discussions tout au long des traitements du patient. Le type et la quantité d’informations à donner dépendent de chaque patient et peuvent varier au cours des traitements.
La présentation a également porté sur la façon d’encadrer les discussions sur les chances de survie. Selon une étude, il est préférable de présenter les informations selon trois scénarios — pire scénario, scénario typique et meilleur scénario — (88 %) au lieu de présenter uniquement les chances de survie moyennes (5 %). Le site Web Cancersurvivalrates.com peut être utile pour présenter les informations, mais il ne devrait être utilisé que comme point de départ de la discussion avec son médecin, car certaines données peuvent être obsolètes et ne pas être représentatives de tous les patients. (Le guide de sensibilisation du RCCS, Les soins palliatifs au Canada, est une ressource utile).
Les discussions portant sur la fin de vie sont plus efficaces lorsque l’on connaît les attentes des patients en termes de pronostic. Ces discussions doivent permettre de déterminer les valeurs, les priorités et les préférences des patients, et de présenter les services de soins palliatifs disponibles et les options de fin de vie. Les patients sont plus susceptibles de se voir offrir le type de soins palliatifs qu’ils préfèrent lorsqu’ils en ont discuté avec leur médecin.
Mode de vie
Utilisation de la médecine intégrative et des médecines alternatives dans le traitement des cancers du sein avancés
La médecine intégrative combine les traitements traditionnels contre le cancer et des approches complémentaires comme la réduction du stress basée sur la pleine conscience, l’activité physique, l’acuponcture, l’alimentation et les suppléments vitaminiques. (Vous pouvez lire le magazine des patients du RCCS sur les thérapies complémentaires ici). La médecine intégrative affirme pouvoir améliorer la qualité de vie des patients en réduisant les effets secondaires physiques (douleurs, fatigue, déficiences cognitives, etc.) et psychologiques (anxiété, dépression, stress, etc.).
La présentation a mis en avant des études démontrant les avantages de cette approche. Bien qu’il existe suffisamment de données prouvant les bienfaits de l’activité physique et de la réduction du stress basée sur la pleine conscience, il existe bien moins de données sur ceux de l’acuponcture. Les données sur les éventuels avantages ou dangers liés à l’alimentation et aux suppléments vitaminiques sont, quant à elles, insuffisantes. La plupart des vitamines ne sont pas recommandées, non pas parce qu’elles ne sont pas efficaces, mais parce qu’il n’y a pas assez de données prouvant qu’elles ne présentent aucun danger. La présentation a également souligné le manque d’études pour les personnes atteintes d’un cancer du sein avancé, la plupart des études portant sur l’ensemble des stades du cancer du sein ou sur plusieurs types de cancer du sein, en général.
Enfin, l’intervenant a parlé de l’importance de parler aux patients des médecines alternatives au début de leur prise en charge, puisque 80 % des patients utilisent une forme de médecine alternative au quotidien. Il est particulièrement important d’aborder les sujets de l’alimentation et des suppléments vitaminiques en raison des interactions médicamenteuses qu’il pourrait y avoir.
Il faudrait plus de recherche et d’éducation sur les médecines alternatives.
Quel est l’état actuel de la recherche sur la relation entre l’alimentation et l’activité physique chez les personnes atteintes d’un cancer du sein métastatique?
L’alimentation et l’activité physique sont reconnues pour améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer du sein métastatique. Mais que dit la recherche?
La plupart des études se concentrent sur la prévention du cancer et la réduction des risques de récidive, mais pas sur l’amélioration de l’espérance de vie ou la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer du sein métastatique. Les quelques études existantes montrent que l’activité physique pourrait limiter la vitesse de croissance des tumeurs sans toutefois réduire les tumeurs existantes. L’activité physique pourrait également soulager les symptômes liés au cancer et aux traitements, comme la fatigue, la qualité du sommeil, la dépression et l’anxiété. Les recommandations actuelles préconisent 150 minutes d’activité physique modérée par semaine.
S’agissant de l’alimentation, on constate un manque d’études spécifiques aux personnes atteintes d’un cancer du sein avancé et un manque de cohérence dans les résultats des études existantes. Il n’existe aucune donnée concluante en faveur ou en défaveur de l’alimentation comme moyen d’améliorer son espérance de vie ou sa qualité des vies. Un nombre limité de données suggère qu’une alimentation à base de plantes pourrait aider à combattre la fatigue. Les recommandations actuelles sur la gestion des symptômes associés aux traitements préconisent l’adoption d’une alimentation à base de plantes et la consommation limitée de certains aliments, en adéquation avec le mode de vie des patients.
La présentation a également parlé de certains obstacles qui empêchent les personnes atteintes d’un cancer du sein métastatique de pratiquer une activité physique et de modifier leur alimentation (p. ex. la capacité financière, le manque de professionnels spécialisés, le manque de données et l’absence de motivation). La promotion de la recherche, l’éducation des patients, la mise en place d’objectifs et la création d’un système de soutien social sont des moyens qui permettent de favoriser la pratique d’une activité physique et la modification de l’alimentation. Bien que plus d’études soient nécessaires, il apparaît que l’adoption d’une bonne alimentation et la pratique d’une activité physique régulière sont essentielles à sa prise en charge générale et à la gestion du cancer du sein métastatique.
La participation du RCCS à la Septième conférence internationale de consensus sur les cancers du sein de stades avancés a été en partie rendue possible grâce au financement du transport par Roche Canada et ABC Global Alliance.